jeudi 13 mai 2010

Retraites - Les agriculteurs “cocus de la nation”

C’est en début de semaine prochaine que le gouvernement devrait dévoiler les différentes options envisagées pour la réforme des retraites. A l’approche de l’échéance, les prises de position se multiplient. Après les simulations du Comité d’orientation des retraites (COR), révélées mardi, démontrant que le financement du régime de retraites est incertain à l’horizon 2050, c’était au tour du Conseil d’administration de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav) de donner son avis. Dans une « déclaration commune » adoptée mercredi par une majorité de ses membres, l’instance émet le souhait que la réforme envisagée permette de retarder l’« âge effectif » à laquelle les Français arrêtent de travailler. Actuellement, en moyenne, les salariés du privé liquident leur retraite à 61,5 ans alors qu’ils peuvent le faire dès 60 ans.

Des déséquilibres criants
Côté « ayants droit » justement, le changement n’est pas forcément synonyme de régression. Au contraire. Pour certaines professions, la réforme gouvernementale en gestation peut offrir l’opportunité de remédier à des déséquilibres criants. C’est particulièrement vrai pour le monde agricole. Les pensions des agriculteurs sont nettement inférieures à celle des salariés du régime général : – 30 % en moyenne ! La situation des conjoints est encore plus critique.

Mardi, à Laon (Aisne), 200 paysans retraités ont ainsi manifesté, brandissant des cannes peintes en rouge, dénonçant des pensions qualifiées d'« indignes ». « Nous sommes bien les cocus de la nation » résumait abruptement Henri Carton, le président de la section des anciens exploitants de l’Aisne, une composante de la FNSEA, le principal syndicat agricole.

Pourquoi cette situation ? Le faible montant des pensions est directement lié à la faiblesse des revenus agricoles. « 70 % des agriculteurs ont un revenu inférieur au smic », explique Jean-Bernard Bayard, secrétaire général adjoint de la FNSEA. De plus, « le calcul pour les agriculteurs ne se fait pas sur les 25 meilleures années comme dans le régime général mais sur toute la carrière. Donc, les bonnes comme les mauvaises années entrent dans le calcul ». S’ajoute enfin le problème des carrières incomplètes ou en pointillés, très fréquent dans la profession, notamment pour les conjoints.

Remise à niveau
« Nous représentons 15 % des retraités en France et nous ne touchons que 5 % du montant des retraites », souligne encore Henri Carton, de la section des anciens exploitants de l’Aisne. Sa situation personnelle témoigne de ce malaise : à 70 ans, cet ancien producteur de lait qui a commencé à travailler à l’adolescence, touche 848 euros mensuels. Soit à peine 208 euros de plus que le minimum retraite agricole fixé depuis 2009 à 640 euros. A titre de comparaison, dans l’Hexagone, le seuil de pauvreté est actuellement fixé à 910 euros par mois. Son épouse qui a travaillé avec lui ne touche que la montant plancher prévu pour les conjoints d’exploitants agricoles : 540 euros.
« Nous attendons toujours la retraite minimale à 75 % du Smic, telle qu’on nous l’avait promise en 2002 par la loi de Retraite complémentaire obligatoire (RCO), conclut Henri Carton, et nous réclamons à terme 85 % du Smic, comme pour les autres secteurs. » Une remise à niveau qui est loin d’être acquise.

France Soir

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