mercredi 2 novembre 2011

Le village indigné

Celui qui « monte la garde », comme indique le petit panneau accroché sur le portail, ne fera plus peur à personne. Triste ironie. Le chien de cette maison désertée de Badefols-sur-Dordogne, entre Lalinde et Le Buisson-de-Cadouin, est mort. Il gît là, au bout de sa laisse, contre la clôture du jardin. À la vue de tous. Alors, depuis quelques jours, l'indignation monte. « Ce chien est attaché : il a dû manquer d'eau et de nourriture », explique Marina, esthéticienne à Lalinde, choquée. « De par sa posture, on devine qu'il a cherché à s'enfuir. » Mais il est resté prisonnier.
La maison se trouve sur la route du Buisson. Marina passe devant cette maison « abandonnée » tous les jours, mais elle n'avait rien remarqué. Et puis, une cliente lui a raconté : « Elle avait appris que les gens qui habitaient là ont déménagé en laissant leurs deux chiens. L'un des deux se serait sauvé. »

Un panier et une gamelle
La maison semble en effet à l'abandon. L'herbe est haute, tout est clôturé. On voit un frigo dans la cour et des rideaux manquent à certaines fenêtres. Il y a un panier, des couvertures, une gamelle et un peu plus loin, le cadavre de l'animal en décomposition. Il semble avoir essayé de fuir en creusant entre le mur et la clôture. En vain. On a désormais du mal à déterminer la race de ce chien, qui devait être imposant.
La cliente a aussi raconté à Marina qu'« une personne a contacté la SPA, en signalant le décès de la pauvre bête ». Mais l'association ne peut pas intervenir sur une propriété privée. D'après le plus proche voisin de la maison, il y avait deux chiens sur place, « dont un genre berger allemand. Il se serait sauvé, il aurait tué quelques poules non loin d'ici et divagué sur la voie publique. On ne sait pas ce qu'il est devenu. » Et le chien décédé ? « Nous l'avons entendu quelques fois », raconte le voisin. « Il devait avoir faim et soif… » Cet homme n'a pas connu les locataires de la maison. « On ne se parlait pas, on ne les a jamais vus. »
Impasse juridique
Michel Couderc, le maire de la commune, a tenté de faire disparaître ce cadavre gênant. « Il y a déjà trois semaines, nous avons fait venir les gendarmes et les pompiers », raconte l'édile. « Ils n'ont pu que constater et faire leur rapport. Nous avons un contrat de fourrière avec la SPA, mais le directeur nous a bien précisé que c'est au propriétaire de faire les démarches en ce sens et de régler la facture. »
Sauf que la propriétaire reste sourde à ces demandes. Elle renvoie la responsabilité sur son locataire. « Pour moi, il est toujours là-bas », explique-t-elle. « Malgré son absence depuis au moins trois mois et le non-paiement du loyer depuis cinq mois », précise-t-elle. Ils avaient emménagé au début du mois de janvier. « Ce n'est pas à moi de porter plainte : il faudrait que quelqu'un d'autre le fasse. Moi, je ne veux qu'une chose, c'est enterrer ce pauvre chien et récupérer ma maison. »
Bref, comme dit le maire Michel Couderc, « nous sommes dans une impasse ». Il ne peut que regretter « une situation anormale », et analyser « un phénomène de société » à travers cet abandon sordide.
http://www.sudouest.fr/2011/10/31/le-village-indigne-541093-1720.php

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