jeudi 3 février 2011

Scandale de l'amiante en Sambre-Avesnois : qu'est-ce qu'on attend pour s'indigner ?

Trois cents invitations lancées, mais une soixantaine de participants, la plupart retraités. Peu d'élus, de rares actifs, des syndicalistes « évaporés », Jacques Thurette, président d'ALDEVA-SA, n'a pas caché sa déception samedi à Leval face à une assemblée qu'il aurait aimé plus fournie. Constat amer : le scandale de l'amiante mobilise peu (indiffère ?) alors que l'association aurait bien besoin d'encouragements politiques (moraux et financiers) et d'appuis (syndicaux) au sein de l'entreprise. Dans un local prêté par la municipalité de Leval, quatre-cinq bénévoles, épaulés par un avocat spécialisé, travaillent sans relâche pour aider les personnes touchées par les maladies dues aux poussières d'amiante, et Dieu sait si la fibre a été utilisée dans les sites industriels sambriens jusqu'à son interdiction en 1997 ! Le territoire doit s'attendre à un drame sanitaire majeur dont les conséquences sociales se prolongeront pendant plusieurs dizaines d'années en raison du temps de latence des maladies (plaques pleurales, asbestose, cancer du poumon, mésothéliome...). Les scientifiques, épidémiologistes et pneumologues annoncent 100 000 morts en 2025 en France. Il faut y ajouter un nombre considérable de malades du cancer et d'insuffisants respiratoires. « Certains diront alors "si j'avais su", mais ce sera trop tard », a souligné Jacques Thurette. Le tableau est bien sombre, mais l'association a néanmoins quelques raisons d'espérer. Elle affiche un bilan impressionnant avec 56 dossiers traités et en cours de traitement, dont une série de victoires judiciaires devant les juges du tribunal des affaires de la sécurité sociale (TASS). Devant cette juridiction, elle a ainsi obtenu, pour des dizaines d'anciens ouvriers des sites industriels du bassin de la Sambre (leur veuve et leurs enfants en cas de décès), que « la faute inexcusable de l'employeur » soit reconnue. Ce jugement ouvre à une indemnisation maximale et offre une dimension morale fondamentale : la faute de l'employeur. « Il faut deux mois environ avant qu'un dossier ne soit jugé par le TASS de Valenciennes. Dans le sud de la France, il y a deux ans d'attente », s'est félicitée Me Hélène Aveline, avocate du cabinet parisien Tessonnière. Les victoires de l'ALDEVA n'ont rien d'automatique, c'est un combat intense qui s'appuie d'abord sur des témoignages authentifiés d'actifs ou de retraités sur les conditions de travail et la description des postes, lors de l'exposition à l'amiante chez l'employeur. L'avocate a insisté sur l'importance d'obtenir ces attestations. « 50 % du boulot c'est vous : il faut aller chercher ces témoignages, être en contact avec les uns les autres », a lancé Me Aveline. Mais cette démarche solidaire ne va pas de soi pour tout le monde. La veuve d'un ancien ouvrier de chez Vallourec, décédé à l'âge de 49 ans, a lancé un appel urgent et désespéré aux collègues de l'atelier chaudière pour obtenir des témoignages sur les conditions de travail de son époux. « Dans un dossier d'un salarié de chez Dembiermont, le patron lui a proposé une somme d'argent pour abandonner sa démarche », s'est insurgé Jacques Thurette. La chape de plomb s'abat parfois sur le risque amiante au détriment de l'entraide et de la solidarité, alors qu'il serait urgent de s'indigner dans les entreprises. • http://www.lavoixdunord.fr/Locales/Maubeuge/actualite/Secteur_Maubeuge/2011/02/02/article_scandale-de-l-amiante-en-sambre-avesnois.shtml

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