mercredi 21 octobre 2015

Antoine, chassé de chez lui car homosexuel : «Je m'étais dit que mes parents me comprendraient»

Un lycéen de 17 ans a été chassé de chez lui par ses parents, le jour où il leur a annoncé son homosexualité. Quatre mois après les faits, ce jeune, très choqué, a souhaité témoigner avec courage.
Antoine* va bientôt avoir 18 ans. Ce jeune, élève en terminale scientifique dans un lycée toulousain, devrait terminer son parcours de lycéen parmi les meilleurs de sa classe. Il est passionné par le basket, le VTT et le cinéma. Il a une vision très précise de son avenir professionnel. Après le bac qu'il espère obtenir avec mention, il veut intégrer une école d'architecture. Cela fait des années que ce métier l'intéresse (petit il dessinait déjà des plans) et cela fait aussi des années qu'il assume pleinement son attirance exclusive pour les garçons. Seulement voilà…
Antoine que s'est-il passé ?
Un truc auquel je ne m'attendais pas en 2015. Tout d'abord il m'a semblé utile de le dire à mes parents. Comment imaginer vivre toute une vie autour d'un mensonge. Je savais que pour mes parents cela ne serait peut-être pas aussi naturel que pour moi et puis j'en avais marre de laisser croire que mes copines qui venaient à la maison étaient peut-être autre chose que des copines.
Comment leur as-tu annoncé la nouvelle ?
Vous savez j'aimais mes parents, j'ai une petite sœur adorable et j'avais une vie plutôt confortable. Mon père et ma mère ont plutôt bien réussi professionnellement. Mes 18 premières années se sont déroulées sereinement. Quand j'ai pris la décision de leur annoncer que j'étais homosexuel, j'ai longuement réfléchi aux mots que j'allais employer. Et puis je me suis dit que mes parents étaient intelligents, qu'ils m'aimaient et qu'ils comprendraient. Alors je l'ai dit. Naturellement.
Quelle a été leur réaction ?
C'est là que tout a basculé ! Ma mère a fondu en larmes et mon père après quelques minutes de silence s'est levé, s'est approché de moi et m'a dit : «Je ne sais pas ta mère, mais moi je ne veux pas d'une tapette dans la famille, aussi je te donne une soirée pour disparaître de cette maison». Je ne m'attendais évidemment pas à une réaction «youpi la joie», mais là !
Comment expliques-tu cette attitude ?
Mon père a toujours été assez autoritaire et rigide, mais je n'avais jamais rien entendu à la maison qui puisse me faire imaginer une telle réaction. Oui bien sûr ! Des mauvaises blagues sur les «pédés», des propos hostiles d'amis auxquels mes parents ne réagissaient pas.
Tu penses que tes parents vont revenir sur leur décision ?
C'est ce que j'ai cru, mais maintenant cela fait 4 mois que j'ai été mis à la porte, alors… Et puis le choc a été si violent que je crois que maintenant tout est brisé et que je ne me vois pas retourner dans une maison où je me suis fait traiter de «tapette» avec haine.
Qu'as-tu fait pendant ces quatre mois ?
J'ai été hébergé chez une cousine à Toulouse. Ma mère ne veut pas me voir mais via ma cousine (enfin c'est ce que dit ma cousine) elle fait le nécessaire. Dans un premier temps cela m'a permis de continuer à «vivre», à aller au lycée, penser à mon avenir.
Pourquoi dis-tu dans un premier temps ?
Parce qu'aujourd'hui, le choc passé, j'en mesure les conséquences. Un chagrin immense pour ma mère qui ne se rebellera pas. Et puis ma sœur qui me manque et mon père pour qui je n'ai que du mépris. Du coup je me retrouve triste et j'ai peur pour mon avenir. Je vais avoir 18 ans dans quelques semaines, je veux pouvoir maintenant vivre ma vie et ne plus rien devoir à une famille qui m'a rejeté.
Comment vas-tu faire ?
Une association me donne un coup de pouce, des amis aussi mais cela reste compliqué. Je réalise qu'on m'a tout enlevé : une famille que j'aimais, une vie propice à mes études. Tout cela parce que je suis gay, non mais je rêve. On n'est plus en 1950 !
Tu sais que tes parents ont une obligation envers toi au moins jusqu'à tes 18 ans ?
Oui mais comment imaginer qu'après cette épreuve dont je ne suis pas encore sorti je me lance dans une autre toute aussi traumatisante. Non, c'est fini. Je dois passer à autre chose.
Qu'as-tu à dire aux autres jeunes qui eux aussi veulent ne plus «faire semblant» ?
Quoi qu'il en coûte, quelles que soient les conséquences je dis qu'il est indispensable de vivre son homosexualité comme les hétéros vivent leur hétérosexualité : naturellement.
Pourquoi vouloir à tout prix garder ton anonymat ?
Parce que je ne veux pas porter en bandoulière ce qui m'arrive. Il y en a beaucoup d'autres pour qui c'est peut-être encore plus violent. Je le raconte, chacun en pensera ce qu'il voudra.
*Antoine est un prénom d'emprunt.
http://www.ladepeche.fr/article/2015/10/21/2202024-antoine-chasse-chez-car-homosexuel-etais-dit-parents-comprendraient.html

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