dimanche 9 mai 2010

Claude Durand : « Oui, les prix littéraires sont truqués

Extraits d'un article du Figaro.fr

L'ancien patron de Fayard publie un livre raillant son métier. Le Tout-Saint-Germain frémit. On lui reproche de cracher dans la soupe, et certains confrères estiment que c'est l'hôpital qui se moque de la charité. Rencontre et explications.

Il fait surtout beaucoup de bruit ces jours-ci en publiant sous pseudonyme un second roman moquant le monde de l'édition avec une réjouissante férocité. Le milieu germanopratin cherche à y reconnaître quel acteur de l'édition incarne tel personnage soidisant fictif. Le néophyte, lui, découvrira l'envers du décor d'une industrie secrète, voire méconnue. Et ce n'est pas toujours joli...

Les prix font-ils tous réellement vendre ?

Un Goncourt peut faire vendre plus de 500 000 exemplaires, mais il peut aussi bien faire moins de 100 000 ! Inversement, des prix moins convoités comme le Médicis ou le Femina peuvent générer des chiffres de ventes très honnêtes, voire supérieurs à un médiocre Goncourt. C'est l'ensemble des cinq grands prix qui constitue l'enjeu, à quoi on peut ajouter de temps en temps celui de l'Académie française : un livre austère ou peu attrayant peut être couronné par le Goncourt, alors qu'un livre plus abordable ou écrit par un auteur plus populaire décrochera le Renaudot ou l'Interallié.

Et comment sont-ils truqués ?

Il n'est pas rare que les prix couronnent de bons livres. La question posée concerne l'honnêteté du système, non celle des gens. D'abord, les jurés se cooptent. C'est la «reproduction» selon Passeron et Bourdieu ! Quand telle maison a trois jurés et qu'elle risque, l'âge aidant, de ne plus en avoir qu'un ou deux, elle va tout faire pour conserver son nombre de «couverts». C'est ainsi qu'on a pu parler de la perpétuation d'un système «Galligrasseuil» (contraction de Gallimard, Grasset et Le Seuil, ndlr) ; il serait d'ailleurs plus approprié de parler aujourd'hui de Gallisset ! Le défaut de ce système fermé, c'est qu'il a une fâcheuse tendance, à la longue, à ne plus couronner des oeuvres, mais des éditeurs. La méthode la plus courante est le troc de voix. Des patrons de maison ou leurs subordonnés vont tenter un marchandage en disant, par exemple : «Moi, j'ai deux voix au Goncourt, et tu en as trois au Renaudot. J'ai eu le Goncourt l'année dernière, donne-moi tes voix au Renaudot et je te donnerai mes voix au Goncourt...», et ainsi de suite avec, parfois, des échanges plus sophistiqués. Les réformettes apportées aux règlements des différents prix n'ont guère banni ces pratiques, même si elles ne sont pas systématiques. Si certains jurés restent libres, c'est qu'ils ont assez de caractère ou de succès pour se le permettre.
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